DROIT ET PRÉVENTION DE CRIME: APRÈS LES SANCTIONS AMÉRICAINES À L’ENCONTRE DE FATOU BENSOUDA, LES CONDAMNATIONS DE LA CPI.

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La Cour pénale internationale (CPI) a condamné les sanctions économiques imposées le mercredi par les États-Unis à l’encontre de sa Procureure et d’un membre de son Bureau.

En effet, le 2 septembre 2020, le Secrétaire d’État américain, Michael Pompeo, a annoncé lors d’une conférence de presse, à Washington, l’imposition de sanctions économiques contre la Procureure de la CPI, Fatou Bensouda, accusant la Cour de « tentatives illégitimes de soumettre des Américains à sa juridiction ». M. Pompeo a porté cette accusation contre la CPI alors que le tribunal siégeant à La Haye, au Pays-Bas, vérifie si les forces américaines ont commis des crimes de guerre présumés en Afghanistan.

Le chef de la Division de la compétence, des compléments et de la coopération de la CPI, Phakiso Mochochoko, est également visé par ces sanctions pour avoir, selon le chef de la diplomatie américaine, « matériellement aidé la Procureure Bensouda ». M. Pompeo a soutenu que les États-Unis prenaient ces mesures, « parce que la CPI continue de viser les Américains, malheureusement ».

Les sanctions visant Mme Bensouda et M. Mochochoko font suite à un décret publié début juin par le Président des Etats-Unis, Donald Trump, autorisant des sanctions économiques contre les personnes étrangères directement engagées dans les efforts de la CPI pour enquêter sur le personnel américain ou allié, et ceux qui l’ont matériellement aidé dans ces efforts. Ces sanctions concernent notamment le gel d’avoirs éventuels aux Etats-Unis des personnes visées et l’interdiction de leur accès au système financier américain. M. Pompeo a également annoncé que le Département d’État américain a limité la délivrance de visas à certaines personnes impliquées dans les efforts de la CPI pour enquêter sur le personnel américain.

La CPI a été critiquée par Washington depuis sa création en 2004 par le Statut de Rome. Avec la Russie et la Chine, les Etats-Unis restent l’un des 12 pays qui ont refusé de souscrire à sa juridiction.

La CPI dénonce de graves attaques sans précédent
Dans un communiqué de presse publié le même jour, la CPI a condamné les sanctions économiques américaines à l’encontre de Mme Bensouda et de M. Mochochoko, dénonçant « une nouvelle tentative d’interférer avec l’indépendance de la justice et des poursuites de la Cour et son travail crucial pour lutter contre les crimes graves qui touchent la communauté internationale, conformément au Statut de Rome de la CPI ».

« Ces actes coercitifs, dirigés contre une institution judiciaire internationale et ses fonctionnaires, sont sans précédent et constituent de graves attaques contre la Cour, le système de justice pénale internationale du Statut de Rome et l’Etat de droit en général », souligne le communiqué de la CPI.

La CPI a indiqué qu’elle continuera d’appuyer fermement son personnel et sa mission de lutter contre l’impunité pour les crimes les plus graves du monde au regard du droit international, de manière indépendante et impartiale, conformément à son mandat. « Ce faisant, la Cour bénéficie du soutien et de l’engagement résolus des deux tiers des États du monde qui sont parties au Statut de Rome », a-t-elle précisé.

L’Assemblée des Etats Parties au Statut de Rome soutient la CPI et son personnel
Le Président de l’Assemblée des Etats Parties (AEP) au Statut de Rome, O-Gon Kwon, a fermement rejeté, mercredi, les mesures prises par les États-Unis contre la CPI, les qualifiant de « sans précédent et inadmissibles contre une organisation internationale fondée par un traité ».

M. Kwon, qui préside l’AEP – le principal administrateur et le corps législatif de la CPI – estime que les sanctions américaines ne feront qu’affaiblir « notre effort commun pour combattre l’impunité pour les atrocités de masse ». Le Président de l’AEP a rappelé que la CPI est une institution judiciaire indépendante et impartiale qui travaille dans le strict respect des dispositions du Statut de Rome. « La CPI est complémentaire des juridictions nationales et reconnait dès lors la compétence première des États. C’est là la pierre angulaire du Statut », a-t-il souligné dans un communiqué de presse.

L’AEP – qui est composée des représentants des États qui ont ratifié le Statut de Rome ou y ont adhéré – et la CPI ont ensemble entamé un vaste processus de réforme dans le but de renforcer le système du Statut de Rome et d’améliorer la performance et l’efficacité de la Cour. « Nous soutenons notre Cour et son personnel et ceux qui coopèrent avec elle dans la mise en œuvre de son mandat judiciaire », a dit M. Kwon.

Une réunion du Bureau de l’Assemblée devrait bientôt avoir lieu pour examiner les mesures imposées par les États-Unis et les différentes manières dont ses membres pourront donner effet à leur soutien à la Cour.

« J’invite les États Parties et toutes les parties prenantes du système du Statut de Rome à réitérer à nouveau notre engagement indéfectible à faire respecter et à défendre les principes et valeurs consacrés dans le Statut, et à préserver son intégrité, sans se laisser décourager par quelque mesure ou menace que ce soit contre la Cour et ses responsables, les membres de son personnel et leurs familles », a ajouté M. Kwon.

Inquiétude du Secrétaire général de l’ONU
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a, de son côté, « pris note avec inquiétude » de la déclaration faite par le Secrétaire d’État américain sur la CPI. « Nous continuons de suivre de près les développements de ce dossier », a déclaré son porte-parole lors d’un point de presse mercredi à New York.

La coopération entre l’ONU et la CPI est fondée sur un Accord portant sur leurs relations qui a été approuvé par l’Assemblée générale des Nations Unies le 13 septembre 2004. « Nous analyserons les éventuelles incidences que cette évolution pourrait avoir sur l’application de l’Accord », a indiqué le porte-parole du Secrétaire général.

« Conformément aux déclarations précédentes du Secrétaire d’État des États-Unis, nous sommes convaincus que toutes les restrictions prises à l’encontre de particuliers seraient appliquées conformément aux obligations du pays hôte au titre de l’Accord de siège des Nations Unies », a -t-il ajouté.

Christophe G. DJOSSOU

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