PANEL DE HAUT NIVEAU A LA COP24: ANTONIO GUTERRES DENONCE L’INDIFFERENCE ET L’INACTION

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[:fr]«Le monde toujours pas sur les bons rails». C’est par cette déclaration que le Secrétaire Général des Nations Unies, Antonio Guterres a commencé son allocution à la COP24 de Katowice. Ainsi, le volet politique de la plus grande rencontre mondiale traitant des questions climatiques démarre. Au total, 40 Chefs d’Etat et de Gouvernements participent au Panel de Haut Niveau qui s’ouvre ce lundi 3 décembre 2018 à la COP24.  En effet, les 200 pays réunis en Pologne pour tenter de mettre en orbite l’accord de Paris doivent « faire beaucoup plus » pour limiter les impacts sans précédent du dérèglement climatique, a plaidé l’ONU dimanche malgré des vents contraires peu propices à une réponse ambitieuse.

Malgré les preuves irréfutables, le monde « ne va pas du tout dans la bonne direction » pour limiter les effets dévastateurs des changements climatiques, a mis en garde le Secrétaire général lundi lors d’un sommet qui teste la détermination mondiale face à l’urgence climatique.

« Même si nous sommes les témoins d’impacts climatiques dévastateurs provoquant le chaos à travers le monde, nous ne faisons toujours pas assez, nous n’allons pas assez vite », et les changements climatiques « vont plus vite que nous », a lancé le secrétaire général des Nations unies Antonio Guterres au deuxième jour de la 24e Conférence de l’ONU sur le climat (COP24) à Katowice.

Pour « beaucoup de gens, de régions et même de pays, c’est déjà une question de vie ou de mort », alors « il est difficile de comprendre pourquoi nous, collectivement, avançons toujours si lentement, et même dans la mauvaise direction », a ajouté le patron de l’ONU.

L’Accord de Paris vise à limiter le réchauffement de la planète à +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle et idéalement à +1,5°C.

Mais, alors que le récent rapport des scientifiques du Giec a montré les nettes différences en termes d’impact attendus entre ces deux objectifs, il a aussi souligné qu’il faudrait, pour rester sous +1,5°C, réduire les émissions de CO2 de près de 50% d’ici à 2030 par rapport à 2010.

Alors que les pays les plus pauvres vont profiter de ce sommet pour réclamer plus d’engagements des nations du Nord, Antonio Guterres a également souligné « la responsabilité collective d’aider les communautés et les pays les plus vulnérables, comme les Etats insulaires et les pays les moins avancés, en soutenant les politiques d’adaptation et de résistance » aux impacts du dérèglement climatique.

« Que Dieu nous pardonne, si nous ignorons les preuves irréfutables, nous deviendrons la génération qui a trahi l’humanité », a-t-il mis en garde. « A ceux qui trainent les pieds, je dis simplement +faites le+ », a-t-il ajouté, lançant « un message sans équivoque » pour relever les ambitions contre le réchauffement.

Les dirigeants d’autres pays vulnérables, comme le Népal ou le Nigeria, doivent également prendre la parole lors de ce sommet où aucun des pays les plus émetteurs de gaz à effet de serre n’est représenté au plus haut niveau.

Cette COP24 doit finaliser dans les deux semaines à Katowice les règles d’application qui permettront la mise en oeuvre de l’Accord de Paris, conclu en 2015 en France.

Les pays les plus menacés par les sécheresses, inondations, ou hausse du niveau des mers, sont les premiers à espérer que la communauté internationale rehausse rapidement ses ambitions de réduction de gaz à effet de serre. Mais ils devraient également rappeler au Nord sa promesse de porter d’ici 2020 les financements consacrés aux politiques climatiques des pays en développement à 100 milliards de dollars par an.

Alors que cette question des financements Nord-Sud pèse régulièrement sur les négociations, la Banque mondiale a annoncé lundi une mobilisation d’environ 200 milliards de dollars de 2021 à 2025 pour l’aide à la réduction des émissions et à l’adaptation au changement climatique, soit un « doublement » par rapport à la période précédente. Et elle a encouragé la communauté internationale à faire « de même ».

Néanmoins, les observateurs craignent que le contexte international, avec notamment le rejet par le président américain Donald Trump de l’Accord de Paris, ne soit pas propice à de nouveaux engagements.

Et la Pologne, présidente de la réunion et défenseur acharné de son industrie du charbon, a d’autres priorités. Outre l’adoption cruciale du mode d’emploi de l’Accord de Paris, elle veut pousser pour une « transition juste » vers une économie bas-carbone et faire adopter au sommet un texte en ce sens.

Selon la version préparatoire vue par Africa Press Bureau, cette « Déclaration de Silésie », coeur de la production houillère polonaise, « reconnaît » l’importance « d’assurer un avenir décent aux travailleurs » du secteur des énergies fossiles touchés par la transition.

Les Polonais ne sont certes pas les seuls à évoquer la question de la « transition juste », mais certains craignent que ce soit une excuse pour ralentir le passage à une économie bas-carbone. « Nous n’avons pas des décennies ou des siècles pour sortir des énergies fossiles », met en garde Alden Meyer, de l’organisation Union of Concerned Scientists.

Avec l’accord de Paris en 2015, le monde s’est engagé à limiter la hausse de la température à +2°C par rapport à l’ère pré-industrielle et idéalement à +1,5°C.

Et le récent rapport du Giec a souligné la différence « nette » des impacts entre ces deux objectifs, que ce soit sur les vagues de chaleur ou l’augmentation du niveau des mers.

Mais les engagements pris aujourd’hui par les signataires de Paris mèneraient à un monde à +3°C.

La planète ayant déjà gagné +1°C, il faudrait, pour rester sous +1,5°C, que les émissions de CO2 soient réduites de près de 50% d’ici à 2030 par rapport à 2010, selon le Giec.

« Le monde nous regarde. (…) Même si l’accord de Paris est un jalon majeur et l’expression de la volonté du monde de lutter contre le changement climatique, cela ne suffit pas », a de son côté déclaré à l’APB Maria Fernanda Espinosa, la présidente de l’Assemblée générale de l’ONU.

« Le genre humain est menacé de disparition alors nous devons agir d’urgence, maintenant, et avec audace », a-t-elle ajouté.

Dans une déclaration inhabituelle, les présidents des quatre précédentes COP, dont le Français Laurent Fabius qui était à la manoeuvre en 2015 pour l’accord de Paris, ont également appelé la communauté internationale à envoyer un « message sans équivoque » sur ses ambitions.

Mais les États seront-ils prêts à le faire pendant cette COP24 ?

Les membres du G20, à l’exception des États-Unis, ont certes réaffirmé samedi leur soutien à l’accord de Paris.

Mais malgré le dialogue politique dit de « Talanoa » destiné à évoquer une hausse des ambitions, les observateurs craignent que la plupart des États, encouragés à réviser leurs engagements pour 2020, n’attendent un autre sommet convoqué par le secrétaire général de l’ONU en septembre 2019 à New York pour afficher leurs objectifs.

Comme une loi a besoin d’un décret d’application, l’accord ne pourra libérer son potentiel sans des règles précises notamment sur la « transparence » (comment les États rendent compte de leurs actions, de leurs financements, de leurs résultats) ou le degré de flexibilité accordé aux pays les plus pauvres. « Il n’y a pas d’accord de Paris sans Katowice », martèle la présidence polonaise de la COP24.

Mais les débats risquent d’être très âpres sur ces sujets sensibles, tout comme sur la question des financements Nord-Sud.

Les pays développés se sont engagés à porter à 100 milliards de dollars par an d’ici à 2020 leur aide au financement des politiques climatiques des pays en développement. Même si ces flux sont en augmentation selon l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), beaucoup de pays du Sud réclament des engagements plus clairs pour que cette promesse soit tenue.

D’autant qu’ils sont les plus vulnérables aux impacts déjà en oeuvre du changement climatique. Si on ne parvient pas « à agir maintenant », cela « risque de nous pousser vers un point de non retour avec des conséquences catastrophiques sur la vie telle que nous la connaissons », a ainsi mis en garde Amjad Abdulla, négociateur pour le groupe des Etats insulaires.

 

Christophe G. DJOSSOU

Depuis Katowice[:]

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