Sénégal : Khalifa Sall, ancien maire de Dakar, enfin libéré
Atmosphère de décrispation politique au Sénégal. Deux jours après la poignée de main entre le président Macky Sall et son prédécesseur Abdoulaye Wade, l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall est sorti de prison après avoir bénéficié d’une grâce présidentielle. En prison depuis 2017, il a purgé la moitié de sa peine de 5 ans pour escroquerie sur des deniers publics. Ses partisans n’ont pas caché leur joie dans les rues de Dakar.
Khalifa Sall a été gracié par le président de la République et va recouvrer la liberté après plus de deux ans de détention dans l’affaire dite de la « caisse d’avance » de la mairie de Dakar qu’il dirigeait, informe l’Agence de presse sénégalaise de source judiciaire. Cette décision inattendue est à l’initiative du président de la République. À noter que l’annonce de la grâce présidentielle intervient deux jours après l’inauguration de la plus grande mosquée d’Afrique de l’Ouest « Massalikul Jinaan » (du nom du traité de soufisme écrit par le cheikh Ahmadou Bamba MBacké, fondateur de la confrérie des mourides, NDLR) par Macky Sall et Abdoulaye Wade, l’ancien président jusqu’alors ennemi juré.
Geste d’apaisement
Le président Sall a accordé une « remise totale des peines » à Khalifa Sall, détenu depuis mars 2017 puis condamné en août 2018 à cinq ans d’emprisonnement pour « faux en écriture de commerce et escroquerie portant sur les deniers publics », selon un décret présidentiel rendu public dimanche. Il en est de même pour ses codétenus Mbaye Touré et Yaya Bodian. « Une remise totale des peines principales est accordée aux condamnés définitifs suivants : Khalifa Sall, Mbaye Touré et Yaya Bodian », énonce le décret présidentiel. Mbaye Touré, ancien directeur administratif et financier de la Ville de Dakar, était le principal coaccusé de Khalifa Sall dans le dossier. Quant à Yaya Bodian, il était comptable de la ville de Dakar. Tous deux avaient été condamnés à 5 ans d’emprisonnement et 5 millions de francs CFA d’amende.
Le garde des Sceaux, ministre de la Justice, est chargé de la mise en œuvre de cette décision, ajoute le décret. Comme précisé par le texte, cette grâce ne concerne que la peine de prison, Khalifa Sall et ses coaccusés sont toujours redevables des peines d’amendes infligées.
Réactions
Khalifa Sall, 63 ans, élu maire de Dakar en 2009 et réélu en 2014, dissident du Parti socialiste et de la majorité, avait été ensuite révoqué de ses fonctions de maire par le chef de l’État sénégalais puis remplacé par une de ses proches, Mme Soham El Wardini. « Je remercie le chef de l’État [Macky Sall] qui m’avait promis cette libération. Il l’a fait. Khalifa Sall va retourner dans sa famille aujourd’hui », a déclaré Soham El Wardini, la remplaçante de Khalifa Sall à la tête de la mairie.
Les soutiens de l’ancien maire ont aussitôt réagi. Le maire de la Médina et membre du parti socialiste Bamba Fall a déclaré : « Nous rendons grâce à Dieu. Nous remercions le peuple sénégalais qui a soutenu jusqu’au bout Khalifa Ababacar Sall. L’ancien maire de Dakar n’était pas à sa place en prison. Mais c’est aussi l’occasion de dire qu’il est temps que l’on arrête d’emprisonner les honnêtes citoyens sans motifs valables. Les droits de Khalifa Sall doivent être restitués. Il est libre, mais il a perdu tous ses droits politiques. La lutte continue pour une amnistie de Khalifa Sall. » « Ils ont sali ton nom, mais Dieu va honorer ton nom publiquement », a écrit Barthelemy Dias sur sa page Facebook.
La grâce présidentielle accordée à Khalifa Sall et ses compagnons est un bel acte posé par le Président pour la réconciliation nationale.
Élu député aux élections législatives en 2017, Khalifa Sall n’avait pas pu siéger. Il avait également vu sa candidature à l’élection présidentielle de 2019 rejetée par la justice, à cause de sa condamnation judiciaire.
Christophe G. DJOSSOU